13 octobre 2023
Newsletter | Gide Africa
Le continent africain est considéré comme l’un des quatre pôles disposant d'un potentiel exceptionnel en termes de production d’hydrogène vert dans le monde.
Nous assistions il y a quelques jours au World Power-to-X Summit à Marrakech et avons pu constater d’une part un réel engouement des acteurs publics et privés et d’autre part, que la question de la régulation était omniprésente durant les débats.
Force est de constater que, malgré des perspectives encourageantes et le volontarisme des pays hôtes, l’absence de réglementations adaptées ralentit le développement de certains projets. C’est un enjeu majeur pour permettre le déploiement des initiatives sur le continent.
En effet, on constate que le défaut de régulation rend les échanges entre investisseurs et pays hôtes plus complexes. Chaque partie tente de défendre ses intérêts dans un contexte législatif et réglementaire incertain ayant pour conséquence de complexifier les discussions et ralentir la prise de décision finale d'investissement de certains sponsors.
Fort heureusement, la plupart des juridictions dans lesquelles nous intervenons appréhendent le sujet de façon proactive et des efforts considérables sont déployés par les gouvernements.
Entre autres, le gouvernement du Royaume du Maroc finalise actuellement l'« Offre Maroc » en matière d'hydrogène vert et travaille en parallèle à la finalisation des textes réglementaires visant à compléter la législation existante en matière de production d'énergies renouvelables (« ENR »).
De son côté, la Mauritanie, où nous accompagnons des sponsors depuis 2021 dans le cadre d'un projet de production d'hydrogène vert finalise un projet de Code de l'Hydrogène. A n'en pas douter, la promulgation de ce code devrait accélérer le rythme de développement de cette opération.
Plus généralement, nous constatons que certaines juridictions comme le Maroc où nous sommes implantés disposent d'un avantage comparatif tenant à leur capacité à s'appuyer sur des législations existantes développées.
En d'autres termes, les pays disposant de textes adaptés au développement de projets indépendants de production d'énergies renouvelables ou d'eau, de législations environnementales et de dispositifs de partenariats publics privés éprouvés disposent d'un avantage concurrentiel indiscutable.
De plus, l'existence de cadres juridiques favorisant l'accueil des investisseurs est déterminante.
De ce point de vue, la flexibilité des régimes de change, l'ouverture aux capitaux et aux bailleurs de fonds internationaux, les règles encadrant l'accès au foncier et l'existence de mesures de facilitations administratives sont autant de facteurs décisifs dans la prise d'une décision d'investissement.
Pour ces pays, l'enjeu sera donc de préciser ou de compléter les législations existantes pour appréhender les problématiques juridiques spécifiques aux projets de production d'hydrogène vert.
A titre d'exemple, la qualification juridique de l'hydrogène devra être précisée dans certains cas et les législateurs devront également encadrer les questions de stockage, de transport, de garantie d'origine et de certification de l'hydrogène pour assurer sa traçabilité et faciliter sa distribution à l’échelle nationale et internationale.
Les gouvernements concernés devront également développer des régimes conventionnels et une offre adaptée afin de promouvoir l'initiative privée tout en préservant l'intérêt public.
Le secteur de l'hydrogène vert est en concurrence entre quatre pôles principaux : l'Afrique, les Amériques (Etats-Unis et Chili), le Moyen-Orient (Arabie Saoudite) et l'Océanie (l'Australie).
Ils sont, d'après l'Agence Internationale pour les Énergies Renouvelables (l’IRENA), « les continents qui possèdent le potentiel technique de production d'hydrogène vert le plus élevé ».
A l'échelle continentale, le Maroc, le Mauritanie, l'Afrique australe et l'Égypte sont les principaux acteurs.
S'agissant du Maroc, le Conseil Mondial de l'Énergie a souligné qu'il était « l’un des six pays du monde ayant un grand potentiel à produire de l’hydrogène vert et ses dérivés, avec une part de marché estimée à au moins 4 % de la demande mondiale d’ici 2030 ».
Dans ce sillage, le gouvernement du Royaume du Maroc a récemment précisé son plan d'action pour favoriser le développement des projets d'hydrogène vert en publiant dans un premier temps une « Feuille de route hydrogène verte ». Celle-ci sera complétée par le lancement prochain d'une « Offre Maroc » à l'horizon 2024.
A ce jour, le plan d'actions annoncé s'articule autour de trois phases de développement : de 2020 à 2030 une utilisation locale de l'hydrogène vert avec une exportation des produits qui en sont issus. De 2030 à 2040 la réduction des coûts de production et un développement des projets à l'échelle nationale et internationale. Enfin, de 2040 à 2050 une expansion mondiale et locale de l'utilisation de l'hydrogène, qui servira notamment à la production de chaleur, à la mobilité urbaine et au développement des transports.
Les autorités marocaines souhaitent également mettre l'accent sur la recherche et développement en la matière à travers la création de la plateforme technologique Green H2A envisagée comme un noyau du Cluster Maroc Hydrogène. Cette infrastructure, une première à l’échelle africaine, a pour ambition de d'appuyer le déploiement industriel de la filière de l’hydrogène vert et de ses applications au Maroc.
Sur la plan législatif et réglementaire, nous n'avons pas connaissance d'un projet de code à l'étude et il semblerait que l'approche retenue consisterait davantage à compléter ponctuellement les dispositifs existants. D'un point de vue pratique et compte-tenu du délai inhérent au travail législatif cette démarche serait d'ailleurs cohérente avec la volonté du gouvernement de présenter l'« Offre Maroc » à brève échéance.
Il est difficile de répondre de manière complète à cette question car le régime juridique applicable à ces projets reste à parfaire.
Toutefois, il est acquis que comme dans tous projets impliquant le développement d'infrastructures nouvelles, l'expérience des régimes de partenariat public-privé doit être mise à profit.
Il est en effet primordial d'assurer un cadre contractuel permettant d'assurer une allocation des risques et des responsabilités optimales sur le long terme. Ce dispositif facilitera le financement des projets, leur développement et leur exploitation pérenne tout en préservant l'intérêt des États et des populations.
De plus, les projets de production d'hydrogène vert sont par nature des projets complexes organisés autour de plusieurs composantes (ENR, eau, stockage, transport, industrielles, etc.) qui requièrent généralement la mise en place d'ensembles contractuels tenant compte du rôle et des compétences des différents intervenants.
De ce point de vue, l'expérience des projets d'investissements structurés autour d'accords-cadres associant les différentes entités publiques compétentes et les investisseurs, doit également servir de précédent utile.