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 raît particulièrement justifié à un moment charnière pour l’Europe où les instances européennes questionnent en effet la nécessité d’adapter les règles existantes et/ou d’innover en définissant des règles nouvelles favorisant l’émergence d’acteurs d’envergure eu- ropéenne.
18 - Voir déjà supra, « Le renforcement de l’attractivité des fonds d’investissement ».
5 Une première réponse législative pour un marché en mutation
Cette évolution législative permet d'apporter des premières ré- ponses à un nouveau segment d'actifs qui se développe sur des dimensions technologiques, juridiques et économiques variées.
En effet, les actifs numériques sont émis par des protocoles infor- matiques divers, offrent des avantages différenciés et s'inscrivent dans des modèles économiques réinventés.
Selon la manière dont ils sont émis, les prérogatives qu'ils offrent et les objectifs qu'ils poursuivent, ceux-ci doivent faire l'objet d'une qualification juridique nécessaire à l'application des règles qui s'ap- pliquent à leur émission et à leur usage.
En traitant les actifs numériques dits "utilitaires"19 la loi Pacte apporte une réponse juridique complémentaire et nécessaire au développe- ment de ce marché qui, compte tenu de sa diversité, devra également faire l'objet de travaux réglementaires au niveau européen.
Par exemple, le traitement juridique des "jetons financiers" (actifs
numériques qualifiés d'instruments financiers au sens de la Direc-
tive MiFID II) nécessitera un certain nombre de clarifications en
droit européen qui pourront être apportées dans le cadre des tra-
vaux en cours menés par les autorités européennes de supervision.
19 - Les actifs numériques utilitaires sont les actifs qui ne sont pas juridiquement qualifiés d'instruments financiers tels que définis dans la Directive MiFIDII.
LA LIBÉRALISATION DES ACTIONS
DE PRÉFÉRENCE
Antoine Tézenas du Montcel et Edmond Schlumberger
Bien que la loi nouvelle n’en opère pas une réforme complète, le régime des actions de préférence bénéficie également de certaines retouches appréciables. L’accent sera ici mis sur les deux principales, qui revêtent une grande utilité pour la pratique du Private Equity.
La première concerne les droits de vote possiblement attachés aux actions de préférence. Jusqu’à présent, ces actions pouvaient certes être assorties de droits particuliers de toute nature, mais dans le respect du principe de proportionnalité entre les droits de vote et les titres de capital détenus et de ses dérogations limitées ouvertes par la loi (v. art. L. 225-122 à 225-125 C. com.). Par consé- quent, il n’était pas possible d’émettre des actions de préférence dotées de droits de vote multiples dans les SA et les SCA, et le
doute demeurait quant à une telle possibilité dans les SAS, en rai- son de l’enchevêtrement complexe des textes respectivement rela- tifs aux SA, aux SAS et aux actions de préférence.
La loi nouvelle dissipe toute difficulté à ce propos, dans la mesure où elle dispose que les sociétés émettant des actions de préférence ne sont plus tenues, s’agissant des droits attachés à ces actions, au respect du principe de proportionnalité précédemment évoqué (v. art. 100 de la loi). Autrement dit, les actions de préférence peuvent se voir conférer des droits de vote multiples, et ce dans toutes les sociétés par actions, y compris les SAS. Précisons cependant que les sociétés cotées demeurent privées d’une telle faculté.
La deuxième retouche essentielle concerne les modalités de rachat des actions de préférence. D’une part, un certain flou était de mise quant à la possibilité de prévoir, au moment de l’émission des actions, leur rachat à survenance d’un terme préalablement défini. D’autre part, ce rachat ne pouvait intervenir qu’à l’initiative exclusive de la so- ciété émettrice, ce qui excluait par définition un rachat à l’initiative du détenteur des actions. L’organisation en amont du rachat des actions de préférence était donc fort peu sécurisée sur le plan juridique.
La loi nouvelle clarifie les choses de manière appréciable à ce pro- pos, et ouvre un espace de liberté longtemps inespéré aux socié- tés non cotées sur un marché réglementé (v. art. 100 de la loi). D’abord, elle lève tout doute quant à la possibilité de déterminer dans les statuts, préalablement à leur souscription, les conditions et délai d’un rachat des actions de préférence. Autrement dit, il est désormais certain que les modalités précises de ce rachat peuvent être prévues en amont, de telle sorte que le rachat pourra ultérieu- rement s’opérer de façon automatique, par l'arrivée d'un terme ou la réalisation de conditions préalablement fixées. Les investisseurs pourront donc négocier, au moment de leur entrée au capital, les conditions de leur sortie future. Ensuite et surtout, et il s’agit là d’une innovation introduite aux cours des travaux parlementaires, le rachat des actions de préférence pourra avoir lieu à l’initiative exclusive du détenteur, possibilité que le législateur s’était jusqu’à présent toujours refusé à admettre. En d’autres termes, l’investis- seur titulaire de ces actions pourra négocier l’obtention d’un vé- ritable droit de sortie dont il pourra user aux conditions prévues pour un tel rachat par la loi et les statuts, soit une faculté qui était jusqu’à présent surtout aménagée par les pactes d’actionnaires. La seule limite à un tel retrait tiendra classiquement au respect de la prohibition des clauses léonines, qui interdira vraisemblablement de prévoir le rachat des titres à l’initiative exclusive de l’investisseur moyennant un prix plancher correspondant au prix de souscription.
L’ABAISSEMENT DU SEUIL DU RETRAIT OBLIGATOIRE
Antoine Tézenas du Montcel
Dans son volet relatif aux mesures en faveur du financement des entreprises par les acteurs privés, le texte prévoit un abaissement de 95 % à 90 % du seuil de détention nécessaire à l’exercice, à l’issue de toute offre publique d’acquisition, du retrait obligatoire
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