6 juillet 2023
La transposition de la directive du 27 novembre 2019 sur la mobilité des sociétés était attendue. L'ordonnance et le décret qui y procèdent permettent non seulement de préciser les différentes exigences de cette directive dans un cadre transfrontalier, mais encore d'apporter des retouches bienvenues aux opérations de restructuration purement internes.
On se souvient que, dans le sillage de la jurisprudence libérale de la Cour de Justice de l'Union Européenne, en dernier lieu par son arrêt Polbud (v. CJUE, gde ch., 25 oct. 2017, aff. C-106/16, Polbud-Wyskonawstwo sp. z.o.o.), la Commission européenne avait entrepris de relancer l'édification d'un cadre harmonisé concernant les opérations dites de mobilité transfrontalière au sein de l'UE. Déjà mis sur pied à propos des fusions (v. Directive 2005/56/CE du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux), fût-ce de manière imparfaite, ce cadre faisait en revanche cruellement défaut s'agissant des scissions et surtout des transformations transfrontalières, soit le nouveau vocable employé par la Commission pour désigner le transfert transfrontalier de siège social, opération qui n'était jusqu'alors admise que pour les sociétés européennes.
Il en résulta l'adoption d'une directive en date du 27 novembre 2019 (Directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières, JOUE L 321, 12 décembre 2019), prévoyant notamment des mesures (i) de contrôle contre les abus et (ii) de protection des parties prenantes compte tenu du changement de lex societatis induit par ces opérations, et dont la transposition devait être opérée par les Etats membres au plus tard le 31 janvier 2023.
C'est donc - à l'instar d'un certain nombre d'Etats membres - avec quelques mois de retard que la France a procédé à une telle transposition, à la suite d'une habilitation législative à légiférer - comme il est devenu coutumier à cette fin - par voie d'ordonnance dans le cadre de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne. L'habilitation était toutefois plus large que prévue, dans le sens où l'article 13 de la loi précitée autorisait le gouvernement, en sus de la transposition proprement dite, à "simplifier, compléter et moderniser les régimes des fusions, des scissions, des apports partiels et des transferts de siège des sociétés commerciales prévus au chapitre VI du titre III du livre II du code de commerce".
Aussi pouvait-on s'attendre à ce que le texte finalement publié par le pouvoir réglementaire ne se résume pas à la transposition de la directive en traitant des seules opérations de mobilité transfrontalière, mais procède en parallèle à un ajustement plus général du régime des opérations internes de restructuration. Ces attentes n'ont dans l'ensemble pas été déçues, à la lecture de l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023, complétée quelques jours plus tard de son décret d'application n° 2023-430 du 2 juin 2023.
De fait, en plus de dresser un cadre complet dédié aux opérations de mobilité transfrontalières (I), ces nouveaux textes opèrent un certain nombre de retouches, parfois non négligeables, aux opérations de restructuration interne (II).
Les dispositions concernant ces opérations sont désormais regroupées au sein d'une même section du Code de commerce (v. art. L. 236-31 à L. 236-53 pour la partie législative, et R. 236-20 à R. 236-40 pour la partie réglementaire), en sachant que les règles édictées à propos des opérations internes dans les trois sections précédentes leur sont également applicables à titre subsidiaire.
Si les dispositions du Code de commerce issues de l'ordonnance et du décret précités traitent successivement des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et transformations transfrontalières, celles concernant les fusions font en réalité office de tronc commun pour les trois autres types d'opérations.
Il en résulte ainsi, pour chacune d'elles :
Outre un plan plus lisible et accordant enfin dans les textes à l'apport partiel d'actif la place spécifique qu'il mérite, deux points retiennent ici plus particulièrement l'attention :